Edifiés aux XIVe et XVe siècles dans l’Entre-Deux-Mers et sur la rive gauche de la Garonne, les moulins à eau fortifiés de Gironde sont remarquables par leurs caractéristiques architecturales. Construits en pierre de taille, dotés de murs très épais, ils sont assortis d’éléments de défense pour se protéger des assauts des troupes régulières, mais aussi des hordes de brigands qui sévissaient dans les campagnes pendant la guerre de Cent Ans.
Ces moulins, ainsi que la terre et l’eau appartenaient à des seigneurs laïcs, aux ordres monastiques et ordres religieux militaires en vertu du droit de ban ou banalité, servitude féodale imposant aux paysans de venir moudre leur grain dans les moulins seigneuriaux.
L’abbaye de Saint-Ferme et surtout celle de la Sauve-Majeure (inscrite au patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO) possédaient de très nombreux moulins. Cette dernière détenait le Moulin Neuf à Espiet, sur le ruisseau de Camiac et le moulin de Daignac, sur le ruisseau la Canaudonne. Le moulin de La Borie, sur le cours de la Gamage, construit au milieu du XIIIe siècle, dépendait au Moyen Age de l’abbaye de Blasimon, toute proche. Il est aujourd’hui propriété du Département de la Gironde.
Une dizaine de moulins subsistent encore de nos jours. Ayant perdu pour la plupart leur fonction originelle, celles de moudre des grains, ils sont devenus pour la plupart des propriétés privées. Certains sont à l’état de ruines, d’autres ont été restaurés et ont fière allure. Sur le Drot, le moulin de Bagas est assurément le plus spectaculaire ! Récemment, le moulin de Labarthe à Blasimon, construit sur une dérivation de la Gamage, a retrouvé son mécanisme.
Ces moulins sont visibles uniquement de l’extérieur. Ils sont exceptionnellement ouverts au public lors des Journées des Moulins au mois de mai et durant les Journées Européennes du Patrimoine en septembre, chaque année. Ils n’attendent plus que votre visite !
Le Moulin de Piis (Bassanne), étape sur la voie jacquaire de Vézelay
Situé près de La Réole, entre la Garonne et le canal du même nom, Bassanne abrite le moulin de Piis, l’un des plus vieux moulins fortifiés de Gironde, au même titre que ses précieux homologues de Bagas et de Blasimon. Les documents d’archives le font remonter en 1319, date à laquelle un acte de vente est conclu entre deux membres de la famille de Piis, longtemps seigneurs des lieux. Léo Drouyn, le grand archéologue et auteur de la Guienne militaire, pense même que sa construction a été entreprise à la fin du XIIIe siècle.
Bâtisse rectangulaire aux dimensions imposantes, le moulin de Piis a conservé son aspect défensif. Une tour carrée ancrée dans son angle Nord, percée d’archères cruciformes à croix pattée typiques du XIIIe siècle, un aménagement des XVe-XVIe siècles avec des mâchicoulis sur le flanc ouest et enfin une bretèche maçonnée dans son angle sud confirment cette vocation de protection.
Le moulin est aussi lieu d’habitation dont témoignent les nombreuses fenêtres et portes percées dans les murailles et les cheminées de l’étage. Son activité première est bien sûr la meunerie. Au XIIIe siècle, deux canalisations traversant le sous-sol du bâtiment alimentent chacune une roue hydraulique horizontale munie de pales et de godets. Le mouvement obtenu par la rotation de cette roue était transmis par un arbre vertical vers le reste du mécanisme situé au rez-de-chaussée du moulin. L’axe terminé par une anille s’encastrant dans la meule courante entraînait la rotation de cette dernière sur la meule dormante qui restait fixe. Les meules en calcaire très dur, rainurées, étaient fréquemment repiquées pour faire face à l’usure du matériau, voire remplacées deux ou trois fois par siècle. Le système médiéval a été utilisé très tard, jusqu’en 1850, date à laquelle la mise en service du canal latéral à la Garonne, devenu aujourd’hui canal de Garonne, perturbe le débit de la rivière (la Bassanne), rendant ainsi le système ancien obsolète. Le moulin reste en activité jusque vers 1930, puis perd sa destination première et devient tour à tour séchoir à tabac, puis étable.
La municipalité de Bassanne rachète le moulin en 1999 à l’état de ruine et l’Association de sauvegarde « Les Amis du Moulin de Piis » est créée la même année. Depuis cette date, les efforts conjugués de ces derniers avec l’appui des collectivités territoriales, de l’Europe, du mécénat privé, de l’Association Girondine des Amis des moulins, ont permis de sauver ce remarquable témoignage de l’architecture girondine.
Ce site remarquable est devenu une étape privilégiée sur la voie jacquaire de Vézelay, puisqu’il dispose d’ un gîte pour les pèlerins de Saint-Jacques-de-Compostelle ; il prête également son cadre enchanteur à de nombreuses manifestations culturelles et festives.
Le moulin de Piis se visite sur rendez-vous, et vous avez la possibilité de pique-niquer sur place.
Association des Amis du Moulin de Piis
- Tél. 05 56 71 06 36