Le 17 juillet 2016, l’œuvre architecturale de Le Corbusier a été inscrite par l’UNESCO sur la liste du patrimoine mondial, au titre de « contribution exceptionnelle au mouvement Moderne ». Après deux tentatives infructueuses en 2009 et 2011, celle de 2016 aura été la bonne avec l’obtention du graal !
La reconnaissance de l’œuvre de Le Corbusier souligne l’importance de la préservation et de la valorisation du patrimoine récent, de moins de cent ans, auquel le ministère de la Culture et de la Communication est particulièrement attaché.
L’inscription porte sur 17 réalisations choisies dans sept pays (France, Suisse, Belgique, Allemagne, Argentine, Japon, Inde) pour montrer la dimension planétaire de l’œuvre de Charles-Edouard Jeanneret-Gris, dit Le Corbusier (1887-1965).
Dix sites se situent en France :
Maison la Roche-Jeanneret (Paris, 1923), Cité Frugès (Pessac, 1924), Villa Savoye et pavillon du jardinier (Poissy, 1928), Immeuble locatif Porte Molitor (Boulogne-Billancourt, 1931), Unité d’habitation – « Cité Radieuse » (Marseille, 1945), Usine Duval (Saint-Dié, 1946), Cabanon (Roquebrune-Cap-Martin, 1951), Couvent Sainte-Marie de la Tourette (Evreux, 1953), Notre-Dame du Haut (Ronchamp, 1955).
L’œuvre de Le Corbusier en Gironde
La Cité Frugès ou les Quartiers Modernes Frugès à Pessac – 1924-1926
Accès : tram B Pessac centre et Bus 4, arrêt le Monteil.
L’industriel Henry Frugès (1879-1974) commande en 1924 à l’architecte Le Corbusier et à son cousin Pierre Jeanneret, la construction de ce quartier. Le projet initial comprend 135 maisons, de la route d’Arcachon à la voie ferrée, avec une place centrale entourée de commerces avec logements à l’étage et un fronton de pelote. Seules cinquante maisons ont été réalisées.
Le lotissement, inspiré des cités-jardins anglaises, comporte des éléments de construction standardisés (ossature en béton armé, poutrelles préfabriquées en béton pour les planchers, fenêtres en longueur) qui permettent une grande diversité architecturale et plastique. Les trois principaux types d’habitations sont :
- gratte-ciel (deux logements jumelés avec rez-de-chaussée partiellement ouvert, deux niveaux d’habitation et toit terrasse accessible)
- quinconces (logements groupés en deux blocs de six et un bloc de cinq maisons, disposées tête-bêche avec, à l’étage deux chambres, salle d’eau et terrasse avec pergola
- arcades (sept maisons, le long du bois, réunies par des voûtes en béton, disposant de trois chambres à l’étage). Ces logements (75 m2 à 90 m2 de surface) comportent entrée, cuisine, séjour au 1er niveau habitable, salle d’eau avec douches et W.-C., deux ou trois chambres au niveau supérieur. Une cuisinière/chaudière/calorifère fournit l’eau chaude et permet la circulation naturelle d’air réchauffé. La cuve en acier des W.-C. chimiques est fixée au plafond de la cuisine…
Les maisons sont polychromes afin de modeler l’espace par utilisation judicieuses des couleurs. La construction, ponctuée de problèmes dus à des innovations techniques mal maîtrisées et des procédures administratives négligées, est lente. Le style des immeubles, qualifié « d’international », heurte des acheteurs éventuels. Les habitations ne furent occupées qu’à partir de 1929. Les familles, confrontées à des problèmes techniques ou de place, transforment leurs logis. En 1973, la rénovation complète d’une habitation, classée au titre des Monuments Historiques en 1980, marque le début d’un processus de restauration. Depuis 1976, l’ensemble de la cité est inscrit à l’inventaire des sites pittoresques de du département de la Gironde.
Classés en ZPAUP (Zone de Protection du Patrimoine Architectural Urbain et Paysager) depuis 1998, les Quartiers Modernes Frugès font l’objet d’un programme de restauration destiné à lui redonner son aspect d’origine. Sur 50 maisons, 24 maisons ont été réhabilitées et plusieurs sont en cours de réhabilitation. L’inscription sur la liste du patrimoine de l’humanité va mettre en lumière ce quartier pessacais et permettre la valorisation et sa conservation.
La réflexion des habitants du quartier à la suite de l’inscription est éloquente :
« Le Corbusier est bien l’architecte du bonheur ! Aujourd’hui est un jour particulier pour nous les habitants des Quartiers Modernes Frugès. Jour heureux car il signe la reconnaissance de l’œuvre novatrice de Le Corbusier et tout particulièrement ici de l’aventure de l’architecture sociale, de l’habitat pour tous. »
Vous souhaitez loger dans une maison du quartier, atypique et étonnante et vous plonger dans l’univers de Le Corbusier ? : contact@lecorbusier22.com
A visiter absolument :
- Maison Frugès-Le Corbusier
- 4, rue le Corbusier 33600 Pessac
- 05 56 36 56 46 – lecorbusier.fruges@mairie-pessac.fr
Propriété de la ville de Pessac, cette maison « gratte-ciel », restaurée dans son état d’origine est ouverte à la visite et lieu de diverses expositions, tout au long de l’année.
Pour les visites commentées et renseignements :
- Kiosque culture et tourisme
- 2, place de la Ve république Pessac
- 05 57 93 65 40 – kiosque@mairie-pessac.fr
Autres réalisations de Le Corbusier en Gironde
Le château d’eau du parc Chavat à Podensac (1917) – Rue Pierre Vincent, en face du parc Chavat.
Pour alimenter le château, le jardin et les dépendances du domaine de Chavat, François Thévenot, industriel, a fait construire un château d’eau. Il s’adresse à Charles-Edouard Jeanneret, architecte à Paris, qui présente un projet en 1917. Deux ans plus tard, l’architecte prendra le pseudonyme de Le Corbusier. Lors du morcellement du domaine après la seconde guerre mondiale, le château d’eau devient propriété du syndicat des eaux de la commune de Podensac. Il sera délaissé au profit du nouveau château d’eau construit à proximité d’une plus grande capacité. Redécouvert en 1983 par des architectes hollandais, il est aujourd’hui géré par l’agence d’architecture Le Groupe de Cinq qui a passé un bail emphytéotique avec la commune le 17 octobre 1987. Classé Monument Historique le 3 juillet 2006 avec le château, les serres, le parc et son décor, un projet de restauration est à l’étude dans ce cadre.
Le château d’eau est un édifice en béton armé, dont la silhouette évoque un phare, est pourvu d’un escalier hélicoïdal et surmonté d’une terrasse. Aux deux tiers de la hauteur de la hauteur, sous le réservoir qui occupe la partie supérieure, se trouve une salle panoramique, appelée gloriette par le concepteur, percée de huit baies. L’architecte la considérait volontiers comme une garçonnière. Le belvédère qui devait surmonter l’ensemble n’a pas été réalisé. Le château d’eau était pourvu d’une pompe avec moteur pour élever l’eau jusqu’au réservoir.
La cité ouvrière de Lège-Cap-Ferret (1924) – Avenue du Médoc
Peu avant la Cité Frugès, à Lège-Cap Ferret, Le Corbusier a livré une petite cité ouvrière en 1924, annonçant les grands principes de l’architecture et de l’urbanisme modernes.
Henry Frugès implante la scierie en 1914, sur l’ancien site de la caserne des pompiers de Lège, afin de fabriquer des caisses et des palettes pour le conditionnement du sucre de canne de la raffinerie familiale. Il choisit Lège pour sa position géographique au cœur de la matière première, le pin. Henry Frugès est un homme érudit, curieux, grand amateur d’art. il découvre les idées de Le Corbusier à travers la lecture de « Vers une architecture » écrit en 1923. Il décide de le solliciter pour son projet de Lège et créer une petite cité ouvrière en face de son usine. Henry Frugès veut donner l’occasion à un jeune talent, de mettre en pratique ses idées innovantes.
La cité ouvrière de Lège comprend six maisons pour loger des familles avec deux types, une maison dite « des célibataires », une place avec un fronton de pelote basque et des jardins ouverts sans barrière.
Ce lotissement représente une disposition urbanistique et architecturale représentative de l’œuvre de Le Corbusier et initiateur d’une majeure partie des idées d’urbanisme et d’architecture modernes
L’ensemble de bâtiments a été protégé au titre de la législation des Monuments Historiques depuis le 30 mai 1990. En 1993, un bailleur social rachète la cité, et la fait restaurer de 1994 à 1997. Les logements sont mis en location en 1998, la vocation sociale initiale est ainsi respectée. Le bâtiment collectif des célibataires, non restauré, est devenu la propriété de la ville de Lège, qui souhaite le transformer en lieu ouvert au public, peut-être un musée.
Association des sites Le Corbusier